Trois patients atteints de paraplégie remarchent grâce à un implant

(RTS info)

Des chercheurs de l’EPFL et du CHUV ont réalisé un implant sans fil qui envoie des stimulations électriques dans la moelle épinière des patients. Après quelques mois, ils sont capables de faire certains mouvements, même sans stimulation électrique.

Des paraplégiques retrouvent la mobilité grâce à une technologie révolutionnaire 19h30 / 1 min. / hier à 19:30

Les trois patients ont pu remarcher avec l’aide de béquilles ou d’un déambulateur. Les chercheurs lausannois ont appliqué une méthode améliorée combinant stimulation électrique et entraînement intensif.

Dans une double étude publiée mercredi dans les revues Nature et Nature Neuroscience, Grégoire Courtine et Jocelyne Bloch montrent qu’après cinq mois d’entraînement, les patients ont recouvré le contrôle des muscles de leurs jambes, jusqu’ici paralysés, même en l’absence de stimulation électrique.

Stimulation électrique et support de poids corporel


David marche avec un soutien du poids corporel. [Jean Baptiste Mignardot – DR] 

David marche avec un soutien du poids corporel. David marche avec un soutien du poids corporel. [Jean Baptiste Mignardot – DR] Ces trois personnes paraplégiques avaient subi des blessures de la moelle épinière il y a plusieurs années (entre quatre et sept ans). Elles ont bénéficié de nouveaux protocoles de réhabilitation qui combinent une stimulation électrique ciblée de la moelle épinière lombaire et une thérapie de support de poids corporel.

Appelée STIMO (pour Stimulation Movement Overground), ce système établit un nouveau cadre thérapeutique pour améliorer la réhabilitation, selon ses auteurs. A la différence de deux études indépendantes publiées récemment aux Etats-Unis sur un concept similaire, ces travaux montrent que la fonction neurologique subsiste au-delà des séances d’entraînement, même lorsque la stimulation électrique est coupée.

Meilleure compréhension


La plate-forme expérimentale des chercheurs. [CHUV/EPFL] 

La plate-forme expérimentale des chercheurs. La plate-forme expérimentale des chercheurs. [CHUV/EPFL] « Nos découvertes se fondent sur une compréhension approfondie des mécanismes sous-jacents, que nous avons acquise au cours de nombreuses années de recherches sur des modèles animaux. Désormais, nous connaissons mieux les régions à solliciter et comment la stimulation électrique atteint ces régions », a expliqué Grégoire Courtine, neuroscientifique de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL).

« A partir de là, nous avons été en mesure de reproduire en temps réel la manière dont le cerveau active naturellement la moelle épinière », précise-t-il.

« Tous les patients ont pu marcher en l’espace d’une semaine avec un soutien du poids corporel. J’ai su immédiatement que nous étions sur la bonne voie », ajoute Jocelyne Bloch, neurochirurgienne au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV/Université de Lausanne), qui a placé les implants sur les patients.

Un dur entraînement


David bénéficie de la stimulation électrique ciblée. [Jean Baptiste Mignardot – DR]  

Pour les patients, le défi consistait à apprendre comment coordonner les intentions de leur cerveau en vue de la marche avec la stimulation électrique ciblée. Cela n’a pas été long.

David bénéficie de la stimulation électrique ciblée. David bénéficie de la stimulation électrique ciblée. [Jean Baptiste Mignardot – DR] « Les trois participants de l’étude ont pu marcher, aidés par un harnais supportant le poids de leur corps, après seulement une semaine de calibration. Et le contrôle volontaire des muscles s’est énormément amélioré en l’espace de cinq mois d’entraînement », note le professeur Courtine.

« Le système nerveux humain a répondu encore plus profondément au traitement que nous ne le pensions », dit-il. Il n’en reste pas moins que cela implique pour les patients un « dur » entraînement, une réhabilitation intensive de plusieurs mois, relève le chercheur.

« C’est un premier pas important pour les paraplégiques », conclut Grégoire Courtine. Il souligne l’importance d’appliquer un tel traitement très tôt, lorsque le potentiel de rétablissement est élevé et que le système neuromusculaire n’a pas encore subi le phénomène d’atrophie consécutif à la paralysie chronique.

« Un grand moment pour moi »

Parmi les trois participants figure le Romand Sébastian Tobler, victime d’un accident en 2013.

Regarder le témoignage de Sébastian Tobler dans le 19h30 hier à 19:30

« Je me suis mis debout, pour la première fois, quatre ans après mon accident », raconte-t-il au 19h30. « Et ça a été un grand moment pour moi, d’autant plus que je suis la personne la plus atteinte parmi les trois qui ont participé à cette étude. »

Cet essai clinique de six mois au CHUV ont été durs. « Cela demande pas mal physiquement, mentalement, c’est un grand travail d’équipe », raconte Sébastien Tobler. « Il faut réussir à prendre le contrôle de ses jambes (…), cela a fonctionné et on voit des résultats prometteurs. »

Regarder le reportage avec le chercheur de l’EPFL Grégoire Courtine / 36.9° / 1h01 / hier à 20:17