Comment inclure des personnes malentendantes dans les entreprises

(Entreprise Romande)

Les personnes sourdes ou malentendantes sont encore discriminées dans différentes situations. Pourtant il existe différents moyens de les intégrer dans les entreprises, comme des outils de support ou des cours de développement des compétences professionnelles. Des formations permettent également aux entendants d’apprendre à communiquer en langage des signes.


Sensibiliser le personnel des entreprises à la langue des signes est important pour mieux intégrer les personnes sourdes ou malentendantes

 

Lauren Hostettler

L’intégration des personnes sourdes ou malentendantes passe notamment par le travail. Différents organismes cherchent à informer sur les difficultés de cette population,mais aussi à promouvoir des solutions existantes. «La Fédération suisse des sourds (SGB-FFS) a édité, il y a de cela quelques années, un flyer sur l’intégration des personnes sourdes sur le marché du travail. Elle récompense tous les deux ans des employeurs qui se sont montrés exemplaires dans ce domaine»,indique Sandrine Burger, porte parole de la SGB-FFS.

DISCRIMINATIONS

En mars dernier, cette Fédération a présenté un rapport concernant les cas de discrimination envers les personnes malentendantes.«Bien que les lois suisses garantissent les mêmes droits aux personnes sourdes ou malentendantes,nous sommes encore loin d’une véritable égalité dans notre pays»,rappelle Harry Wytzthum,directeur de la SGB-FFS. «En 2019, nous avons enregistré plus de deux cas de discriminations par semaine.Cela est d’autant plus inquiétant qu’outre la Constitution fédérale, la loi sur l’égalité des personnes handicapées devrait garantir l’égalité depuis près de vingt ans.» Alors que cinquante-deux cas avaient été signalés en 2017 et septante-six en 2018, la Fédération a enregistré cent six plaintes en 2019.

Ces signalements concernent des relations de santé et de travail. Par exemple, les assurances maladie et les hôpitaux refusent parfois de couvrir les frais des interprètes en langue des signes pour les consultations médicales. Dans le domaine de l’emploi, il apparaît que le nombre d’heures mensuelles payées par l’AI reste insuffisant, ce qui conduit à des malentendus, voire à des ruptures de contrats de travail.En Suisse, le chômage chez les sourds et malentendants est d’environ 9%, soit un taux trois fois plus élevé que celui de la population active moyenne.

En 2019, la SGB-FFS, en collaboration avec la Haute école de Lucerne, a édité un guide des bonnes pratiques. Ce guide en allemand est en cours de traduction en français et en italien. La base du guide est composées des «six piliers de l’intégration»,disponible en ligne en français. Sandrine Burger rappelle que la Fédération propose des conseils et de l’aide juridique aux personnes sourdes qui se seraient senties discriminées.

SENSIBILISER LES ENTREPRISES

L’association S5 travaille à la diffusion et à la promotion de la langue des signes. Elle souhaite rapprocher les personnes sourdes ou malentendantes etl es entendantes, tout en sensibilisant aux changements de vocabulaire. Le terme «sumains»,qualifie les personnes concernées, impliquées et impactées dans la communication différenciée. Le sumain peut désigner un entendant, un sourd ou un malentendant. «L’association propose notamment des formations au sein des entreprises et des institutions afin de sensibiliser les entendants à la culture sourde et à la langue des signes», explique Nathalie Palama, chargée de projet et responsable pédagogique de l’association. Ces sensibilisations peuvent, par exemple, prendre la forme d’une immersion dans la langue des signes à la cafétéria de l’entreprise. Le but est de mettre les collaborateurs dans la peau d’une personne sourde afin de comprendre les difficultés qu’elle peut rencontrer.

La sensibilisation peut ensuite déboucher sur des cours de langue des signes. Cette langue est enseignée aux entendants dès l’âge de 15 ans, dans tous les cantons et pour tous les niveaux.En raison du confinement, les cours sont actuellement dispensés à distance. Ayant reçu de bons retours, ils devraient être maintenus après cette période.«Des cours de langue des signes sont aussi organisés dans les écoles, comme la Haute école de travail social, pour les infirmiers, les logopédistes, etc.»,ajoute Nathalie Palama. Ces cours peuvent être adaptés au vocabulaire et au langage en fonction du domaine d’activités (banque, assurance, santé,scolaire, transport, commerce ou services, notamment).

L’association anime également des cours et des séminaires en langue des signes pour développer les compétences personnelles et professionnelles des personnes sourdes.

L’association S5 met également son expertise au service des entreprises qui souhaitent développer leur visibilité en offrant des traductions français/langue des signes ou des incrustations de langue des signes sur vidéo, par exemple. «Nous travaillons également à la traduction d’émissions de télévision»,indique Nathalie Palama. S5 a aussi créé un annuaire en ligne qui répertorie les entreprises et les services accessibles aux personnes sourdes grâce à un environnement adapté ou doté d ‘un personnel pratiquant la langue des signes. De nouveaux partenariats sont toujours bienvenus afin d’élargir l’inclusion des personnes sourdes.