La communication signée, un lien créé avec les bébés

(Le Quotidien Magazine)

Peu connue il y a quelques années, la communication signée pour les jeunes enfants est en plein développement

 
Depuis 2015, Laure Michel anime les ateliers Signons Ensemble. Le but est de permettre aux tout-petits d’avoir un autre moyen de communiquer, avant de savoir parler.
Texte: Jessica Dubois / Photo; Keystone

«Les enfants ont des choses à nous dire bien avant de pouvoir parler Alors pourquoi attendre pour mieux communiquer ? » C’est ainsi que se présentent les ateliers Signons Ensemble, mis en place depuis quelques années dans le Jura et en Suisse romande. La communication signée, Laure Michel l’a découverte à la naissance de ses jumeaux, en 2007. « Tout d’abord par des livres. Ça m’a intéressé et j’ai cherché à en savoir plus. J’aurais pu suivre une formation, mais elle n’était donnée qu’en France et je n’y voyais pas d’intérêt, car il faut savoir que la langue des signes n’est pas universelle, chaque pays a sa propre langue. Certains signes se ressemblent, voire sont les mêmes, mais pas la totalité. J’ai donc appris toute seule, en m’aidant de livres », explique-t-elle. «À l’époque, ce n’était pas très connu, et encore maintenant il y a de fausses idées qui circulent. Certaines personnes craignent que leur enfant n’apprenne jamais à parler, elles ont peur que cela gâche l’apprentissage de la parole. Or ce n’est pas du tout le cas, car on s’adresse toujours à l’enfant en prononçant le mot en même temps qu’on le signe.» Car c’est cela le but, que les enfants puissent communiquer avec leur entourage même avant de savoir parler. « Pouvoir communiquer, se faire comprendre avant de pouvoir parler, permet d’éviter de la frustration. C’est un autre moyen de communication que l’on développe avec son enfant, simplement. Mais cela va dans les deux sens, l’enfant pourra alors faire comprendre s’il a faim, s’il a mal ou encore s’il a peur. »

Ateliers sur six séances

Les choses évoluent et une formation s’ouvre quelques années plus tard en Suisse romande. Laure Michel, toujours très intéressée par le concept, se lance dans l’aventure en 2015, pour pouvoir elle- même animer des ateliers. Mais comme prérequis, il est demandé aux participants de maîtriser deux niveaux de langue des signes.La Jurassienne, qui n’a aucune connaissance dans le domaine, commence donc des cours chez Pro Infirmis. Elle possède désormais cinq niveaux de langue des signes. « Ce n’est pas facile à apprendre, il y a des mimiques qu’on n’a pas instinctivement, on a souvent l’impression qu’on a l’air bête, mais j’ai adoré suivre ces cours, notre professeur était très motivant, et je trouve ce moyen de communiquer très beau », raconte la Jurassienne. Depuis, Laure Michel a eu l’occasion de dispenser son expérience au cours d’une douzaine d’ateliers, une soixantaine de participants se sont initiés au langage signé. Concrètement, un atelier se déroule sur six semaines d’affilée, une heure par semaine. «J’accueille six familles au maximum. L’enfant est en général accompagné de ses parents, parfois par un autre membre de la famille.» Lors d’une des six séances, une animatrice sourde se joint à Laure Michel pour faire part de son expérience et répondre à toutes les interrogations qui entourent la langue des signes. « C’est un échange très intéressant.»

«Il y a toujours une chanson d’accueil et une chanson pour se dire au revoir. Chaque séance est axée autour d’un thème. » L’alimentation, la journée de bébé, les animaux ou encore les émotions sont notamment au programme. On ne va pas apprendre des centaines de signes, le but n’est pas de décourager les participants », s’amuse Laure Michel. «Et j’adapte le contenu aux besoins des parents. Un peu d’appréhension pointe au début des séances. Les adultes ont souvent peur de ne pas y arriver, de ne pas se souvenir des signes. Mais ceux-ci sont souvent assez logiques, et il y a aussi des moyens mnémotechniques que l’on peut mettre en place. Il ne faut pas non plus se mettre trop de pression, ne pas vouloir en utiliser trop tout de suite. Il est bien plus efficace de choisir ou un deux mots par jour, et de les signer toute la journée, à chaque fois qu’on le prononce », rassure la Jurassienne. « Les cours permettent d’avoir une base, il faudra ensuite la développer chaque jour.»

Les crèches s’y mettent

Il n’y a pas d’âge limite pour participer. «À partir de 10 mois, les enfants sont capables de reproduire les signes. Mais on peut très bien assister à un atelier avec un enfant plus jeune. Il n’y a pas d’âge maximum non plus, cela dépend plutôt de la demande des parents et de leurs envies.» Peu connue il y a quelques années, la communication signée pour les jeunes enfants se développe un peu partout. En crèche notamment, de plus en plus d’éducatrices se forment à cette manière de communiquer

 

Le langage appris aux enfants s’utilise au quotidien, comme le prouvent ces exemples: chat, chien et vache sur la première ligne; rouge, bleu, orange sur la deuxième; et maman, papa,grand-maman sur la troisième.

Des cartes éditées par la Fédération suisse des sourds aident à la compréhension de la communication signée.