Fausses collectes pour Handicap International: trois femmes arrêtées à Genève

(tdg.ch)

Interpellations: Les trois malfrats qui prétendaient récolter des fonds au bénéfice d’enfants handicapés sont actuellement en détention provisoire.


Les trois prévenues sont en détention provisoire à Champ-Dollon.
Image: Laurent Guiraud

 

L’an dernier, la «Tribune de Genève» révélait une arnaque en vogue dans le canton: celle commise par des malfrats qui prétendaient récolter des fonds au bénéfice d’enfants handicapés, sourds-muets et pauvres en prétendant représenter l’organisation non gouvernementale Handicap International (HI).

En détention provisoire

Selon nos renseignements, trois femmes ont été arrêtées l’automne dernier dans le cadre d’une enquête menée par la police genevoise. Actuellement en détention provisoire, le trio de prévenues roumaines sera jugé dans le courant de cet hiver devant le Tribunal de police. Face aux suspectes, sept parties plaignantes, à savoir des aînés et la véritable ONG Handicap International.

Les escroqueries et autres tentatives d’arnaques reprochées aux prévenues se situent entre le 7 et le 11octobre de l’année dernière. Le trio, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, aurait, selon l’acte d’accusation que nous avons pu consulter, «astucieusement induit en erreur des personnes âgées en sonnant à leur porte puis en leur présentant de faux documents avec le logo de Handicap International et en expliquant récolter des fonds pour l’association».

Née en 1938, une retraitée habitant au Grand-Lancy a ainsi remis 60 francs en pensant faire une bonne action. Aux Acacias, un nonagénaire a donné sans sourciller 20 francs sur son palier.

Aller aux toilettes

Dans ses réquisitions, le Parquet reproche aussi aux détenues roumaines des vols en bande. Lors de leurs visites, elles prétextaient se rendre aux toilettes mais en profitaient pour dérober les bijoux de leurs victimes. Visiblement, les voleuses fouillaient aussi l’appartement. Une aînée à la Servette a ainsi vu disparaître une chevalière, des boucles d’oreilles en or et des bagues.

La retraitée du Grand-Lancy s’est fait délester de 800 francs qu’elle gardait chez elle. L’aîné des Acacias a, quant à lui, perdu en quelques minutes 400 francs ainsi que des montres, des chevalières et des bagues.

Pour avoir utilisé le logo de l’association, les voleuses, visées par une plainte de HI, se retrouvent désormais prévenues de faux dans les titres ainsi que de violation du droit de la marque. Enfin, le Parquet reproche au trio de s’être adonné à la mendicité.

Huit mois et une expulsion

À l’occasion de l’audience de jugement, le Parquet compte requérir 8 mois de prison avec sursis ainsi que l’expulsion des accusées.

Ce qui fait bondir Me Bernard Nuzzo, qui défend une des prévenues née en 2001: «Ma cliente est jeune, démunie et sans antécédents judiciaires. Elle a reconnu les faits et manifesté des regrets sincères. Les peines requises sont stratosphériques et totalement surréalistes. Le tribunal ne s’y trompera pas.»

À la défense, Me Florence Yersin représente une femme qui aurait par ailleurs sévi avec une complice introuvable à ce jour. Elle aurait sonné à la porte d’un couple de personnes âgées vivant au-dessus de la gare. Née en 1997, la prévenue leur aurait soutiré 20 francs de don ainsi qu’une boîte en cristal avec un couvercle en argent contenant des bijoux.

Et l’avocate d’ironiser: «Le plus handicapant dans cette affaire serait que le jugement du tribunal genevois ne retienne pas la créativité des trois prévenues roumaines dans la pesée des éléments à décharge.» Défenseur de la troisième suspecte, âgée de 23 ans, MeAdrian Dan n’a pas souhaité faire de commentaire à ce stade de la procédure.

Mise en garde de l’ONG

Les recherches de la police genevoise ne risquent pas de s’arrêter avec l’arrestation des trois suspectes. Interrogé l’an dernier dans nos colonnes, Handicap International dénonçait notamment le cas de personnes qui interpellent les passants dans les rues et usent de faux formulaires de collecte en s’appropriant le nom et le logo de Handicap International afin de tromper les donateurs. L’ONG rappelle qu’elle ne collecte pas d’argent liquide dans les rues et que cette pratique ne correspond pas à sa politique de dons.

La présence de Handicap International sur la place publique se fait uniquement par le biais de stands d’information où elle remet à qui le veut un bulletin de versement. «Nous faisons face chaque année à ce genre de problèmes, rappelait l’an dernier dans nos colonnes Nadia ben Said, responsable des relations avec les médias de l’ONG, et nous portons plainte systématiquement. Depuis 2015, nous avons vu le nombre de ces collectes frauduleuses augmenter.»

Si ce genre de pratiques s’effectue en particulier en Suisse alémanique, la Suisse romande n’est pas à l’abri. En 2019, HI avait répertorié cinq cas à Genève, deux dans le canton de Vaud, contre 25 cas à Zurich et 21 à Berne. Au total, HI a été informé de 71 cas en Suisse l’an dernier.

De manière générale, la police genevoise déconseille le don de la main à la main et rappelle qu’il est préférable de procéder par versement postal ou bancaire.