Pro Infirmis fête son centenaire

(nxp/ats)


Pro Infirmis oeuvre pour que 1,7 million de personnes en situation de handicap en Suisse puissent participer pleinement à la vie sociale. (Photo d’illustration)Photo: Keystone

 

L’association suisse de personnes handicapées Pro Infirmis célèbre ses 100 ans. Fondée à Olten (SO) le 31 janvier 1920 sous le nom d’Association suisse en faveur des anormaux, elle s’engage principalement pour des mesures d’intégration.

Il y a cent ans, une organisation au nom inconcevable aujourd’hui, l’Association suisse en faveur des anormaux (ASFA), était fondée à Olten (SO). Elle existe aujourd’hui encore. Depuis 1935, elle s’appelle Pro Infirmis.

Le terme «anormal» implique l’exclusion, car pendant des siècles seul ce qui était «normal» était voulu par Dieu. Dans l’Antiquité, les pères pouvaient sans autre abandonner dans la nature ou faire tuer leurs enfants «imparfaits». Même le réformateur Martin Luther recommandait encore de noyer les «changeons» ou «changelins» – des nourrissons infirmes que le diable avait échangés contre des bébés sains.

Toutefois, il existait depuis la nuit des temps des invalides vénérés: Hephaïstos, le dieu grec du feu, était boiteux, difforme et borgne. Malgré cela, les dieux l’appréciaient pour ses aptitudes de forgeron. Les cyclopes, avec leur œil unique sur le front, étaient utiles aussi, par exemple lorsqu’ils forgeaient des éclairs pour Zeus. Le principal dieu nordique, Odin, était également à moitié aveugle et cependant puissant.

Au XVIe siècle, l’artiste et calligraphe allemand Thomas Schweicker, dépourvu de bras, était légendaire, de même que, deux cents ans plus tard, Beethoven, malgré sa surdité.

Intégration

Ces «superhandicapés» se distinguaient des «crétins», «débiles» ou «estropiés», comme on les appelait sans pitié, par leur intégration dans la société. Un précepte cher à Pro Infirmis, qui s’engage pour que 1,7 million de personnes en situation de handicap en Suisse puissent participer pleinement à la vie sociale.

À l’origine, l’ASFA, fondée il y a cent ans, le 31 janvier 1920, avait pour but de soutenir les défenseurs des intérêts des handicapés face aux autorités et à la population et de venir en aide plus directement, financièrement surtout, aux personnes concernées.

L’industrialisation favorise la création de petites organisations de bienfaisance: le travail des enfants et les mauvaises conditions de travail font naître de nouvelles déficiences. Parallèlement, les familles nombreuses, où les handicapés étaient généralement pris en charge, se désintègrent.

Dans les usines, corps de métier et certains quartiers, des caisses de solidarité pour les malades, infirmes ou mourants voient le jour. Celles-ci soutiennent financièrement leurs membres handicapés.

L’appel à la création d’une assurance invalidité (AI) se fait de plus en plus fort. La question est discutée au Parlement fédéral en 1919 déjà, mais le financement de l’assurance est controversé et le projet abandonné. En 1923, l’ASFA obtient une première subvention fédérale, avec laquelle elle améliore les conditions de vie dans les établissements pour handicapés.

Assurance vieillesse

Le 6 décembre 1925, le peuple est pour la première fois appelé aux urnes pour se prononcer sur l’introduction d’une assurance vieillesse et survivants obligatoire (AVS). Deux tiers des votants et une majorité de cantons approuvent la base constitutionnelle requise. La Confédération est également habilitée à instaurer une assurance invalidité ultérieurement, mais il faudra encore trente-cinq ans pour qu’elle voie le jour, en 1960.

En attendant, l’ASFA réalise ses propres projets. En 1935 s’ouvrent les premiers services sociaux (appelés aujourd’hui services de consultation, au nombre d’une cinquantaine). Sujet à de plus en plus de critiques, le terme «anormaux» est définitivement abandonné en 1946.

Soutien psychosocial

Avec l’entrée en vigueur de la loi fédérale sur l’assurance invalidité en 1960, un pont est jeté entre l’assistance privée et l’assistance publique. Les organisations privées comme Pro Infirmis sont en partie déchargées financièrement. Leur rôle va par conséquent évoluer: l’aide aux personnes en situation de handicap passe peu à peu d’un soutien essentiellement matériel à une prépondérance du psychosocial.

Depuis, Pro Infirmis s’engage pour des mesures d’intégration, un objectif en partie atteint en 2004 avec l’entrée en vigueur de la loi sur l’égalité pour les handicapés.

En 2020, les festivités du centenaire sont placées sous la devise «L’avenir ne connaît pas d’obstacles». Des manifestations et des actions sont prévues tout au long de l’année pour montrer ce que signifient l’inclusion et la participation au quotidien. «Car les personnes en situation de handicap font tout naturellement partie de la société, mais sont encore trop peu visibles dans différents lieux importants de Suisse», écrit Pro Infirmis sur son site.

Les prestations de Pro Infirmis sont financées à hauteur de 60% par la main publique et 40% par des moyens privés. Selon le rapport annuel, l’organisation fournit 245’000 consultations par an. L’aide directe à des personnes en situation de handicap se monte à 15,8 millions de francs.

Pro Infirmis permet un accompagnement à domicile à un bon millier de personnes, décharge des proches aidants de 90’000 heures et transmet du savoir à 2700 personnes dans les écoles d’autonomie.