Hommage à Anne Tercier, militante hors norme des droits civiques

(Le Temps)

Anne Tercier s’est éteinte à 41 ans, le 30 décembre dernier à Lausanne. La mémoire collective se rappellera d’elle comme d’une militante des droits civiques qui a réussi à surpasser les difficultés de son handicap mental pour faire bouger des lignes dans notre société.


Anne Tercier prend la parole lors d’un Bla-Bla Vote en 2019, qui se tient à la maison de quartier de Chailly à Lausanne. — © Jules Brischoux

 

Omar Odermatt, coordinateur du Bla-Bla Vote pour Eben-Hézer Lausanne. Bruno Wägli, directeur adjoint, responsable du département socio-éducatif d’Eben-Hézer Lausanne.

Vivant depuis le 4 février 2002 au sein d’Eben-Hézer Lausanne (établissement socio-éducatif dépendant de la Fondation Eben-Hézer), Anne Tercier a toujours fait usage de son droit de vote, car comme elle l’affirmait «voter, c’est être reconnue comme une citoyenne à part entière du fait que ma voix compte autant que celle des autres». En 2018, sans explication, elle se voit soudainement privée de ses droits civiques. Débute alors pour elle un combat pour récupérer ses droits, mais également pour que toutes les personnes en situation de handicap puissent être reconnues dans l’exercice de ce droit, conformément à la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées, ratifiée par la Suisse en 2014.

«Pour que chaque voix compte»

Elle est appuyée dans sa démarche par plusieurs députés et trois interventions parlementaires sont déposées au Grand Conseil vaudois entre juillet 2019 et octobre 2020; dont une motion qui, suite à son examen en commission, sera traitée par le parlement.

Son combat a été raconté en septembre 2020 par Le Temps, tout comme son investissement au sein du mouvement Tous Citoyens d’Eben-Hézer Lausanne et du Bla-Bla Vote, un projet porté par la maison de quartier de Chailly et Eben-Hézer Lausanne.


Lire aussi son portrait: Le combat d’Anne Tercier, atteinte de déficience intellectuelle, pour récupérer ses droits civiques

Cet engagement civique lui a valu ensuite des invitations dans plusieurs autres médias nationaux, notamment à l’occasion de la votation cantonale genevoise du 29 novembre dernier qui a abouti à la reconnaissance du droit de vote à près de 1200 personnes jugées incapables de discernement. Le 30 novembre dernier, quelques minutes avant de rejoindre le plateau de l’émission Forum de la RTS, elle confiait: «Je suis très fière, car je suis allée au bout d’une chose que je n’aurais jamais pu imaginer il y a trois ans.»

Oui, Anne Tercier peut être très fière. Son combat politique a mis en lumière que dans le canton de Vaud, des personnes en situation de handicap sont privées de leurs droits civiques sans motif explicite, et ce, au mépris des engagements internationaux de notre pays. Son engagement devrait toutes et tous nous interroger sur la notion même d’incapacité, sur notre regard et la place que nous accordons aux personnes en situation de handicap dans notre société. Malgré son départ précipité, son combat «pour que chaque voix compte» se poursuit.