La plainte d’un cinéphile handicapé est irrecevable

(nxp/ats)

La Cour européenne des droits de l’homme juge irrecevable la plainte d’un homme en chaise roulante qui s’était vu refuser l’accès d’une salle Pathé à Genève.


Défendu par Intégration Handicap, le paraplégique s’estimait victime de discrimination. (photo d’illustration). (Photo: AFP)

 

L’accès en chaise roulante à un cinéma en particulier n’est pas un droit. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) juge irrecevable la plainte d’un Genevois qui s’était vu refuser l’accès à une salle de l’ex-cinéma Rialto. Défendu par Intégration Handicap, ce paraplégique s’estimait victime de discrimination par la chaîne Pathé qui lui avait refusé l’entrée pour des raisons de sécurité en 2008.

Construite et rénovée avant la nouvelle loi fédérale sur l’élimination des inégalités frappant les personnes handicapées, la salle n’était accessible que par un escalier. Or le film n’était projeté dans aucun autre cinéma de Genève.

La CEDH estime qu’il ne découle pas de l’article 8 (droit au respect de la vie privée) «un droit d’avoir accès à un cinéma particulier pour y voir un film spécifique dès lors qu’est assuré un accès aux cinémas se situant dans les environs proches», a-t-elle indiqué jeudi. Ces autres cinémas étant adaptés aux besoins du requérant, «celui-ci avait donc généralement accès aux cinémas de sa région.»

Pas de discrimination

Selon Strasbourg, «le refus d’accès au cinéma en question pour voir le film souhaité n’a pas empêché» cet homme «de mener sa vie de façon telle que son droit au développement personnel et son droit d’établir et d’entretenir des rapports avec d’autres êtres humains et le monde extérieur aient pu être remis en cause.»

Et de rappeler qu’un des buts de la loi fédérale de 2002 est de créer les conditions propres à faciliter aux personnes handicapées la participation à la vie en société, en les aidant notamment à être autonomes dans l’établissement de contacts sociaux. Elle vise à prévenir les comportements ségrégationnistes graves qui tendraient à les exclure de certaines activités.

Pour la CEDH, le Tribunal fédéral (TF) a bien expliqué, en 2012, pourquoi ce cas ne relève pas de la discrimination. Auparavant, le cinéphile avait déjà été débouté par la justice genevoise.

«Loin d’une égalité»

Inclusion Handicap regrette le fait que la CEDH ne se prononce pas sur la discrimination des personnes en situation de handicap. Cette décision a pour effet de maintenir l’interprétation restrictive de la discrimination par le TF, qui n’avait pas tenu compte du fait que le plaignant aurait pu voir le film sans problème s’il n’était pas en fauteuil roulant, a rappelé l’association faîtière suisse.

La CEDH ne s’est pas non plus prononcée sur la liberté d’information – article 10 – invoquée par le plaignant, note Inclusion Handicap. Selon l’association, cette affaire et la pratique judiciaire en vigueur montrent clairement la distance qui sépare les personnes handicapées d’une égalité dans les faits. (décision 40477/13 du 18 juillet 2019)