Le premier prix suisse décerné à l’art brut suscite la polémique

Et si l’art brut se normalisait?

La question se pose au moment où, pour la première fois, un prix suisse récompense une production « d’art spontané ». Décerné à Olten (AG), Aare Brut est doté de 5000 francs.

Attribuée par un jury d’experts et par Procap, l’association de défense des droits des handicapés, la distinction est revenue à la Fribourgeoise Rosalina Aleixo.

Cliquez sur l’image pour écouter le reportage de la Matinale (RTS.ch)

Le prix Aare Brut a été délivré en marge d’une exposition qui rassemble les créations de 14 artistes jusqu’à la fin octobre à Olten, dans une exposition éponyme.

Or, la récompense suscite la polémique: un prix est-il légitime pour récompenser les œuvres de créateurs indemnes de toute culture artistique – la définition même de l’art brut?

Curatrice de l’exposition, Emelyne Fichot explique que ce prix a pour but de favoriser l’émergence des créations artistiques de qualité et de permettre une certaine ouverture aux autres, malgré les réticences.

« Si le besoin de reconnaissance est contraire au principe même de l’art brut, les choses évoluent, en même temps que la société », estime-t-elle.

Lucienne Peiry, historienne de l’art et spécialiste de l’art brut, estime que toute initiative est bénéfique pour mettre en valeur les œuvres et les artistes de cet art spontané, mais sans pour autant cautionner l’idée d’un prix.

« L’idée de compétition, de hiérarchie, est à mon avis étrangère, voire complètement contraire, à l’art brut. L’art brut, c’est l’art de l’intimité, de la sauvagerie, les premières pulsations de la création artistique. Un prix ne convient donc pas à cet art qui est étranger, par définition, à l’idée du palmarès », affirme-t-elle.

Reste qu’avec ou sans prix, les œuvres exposées à Olten ont pour objectif de souligner l’importance de l’inclusion dans le domaine artistique, l’art brut étant aussi l’action de création du secret, de la dissidence ou de la désobéissance.

Source rts culture