La nouvelle app d’Helsana soulève une tornade d’indignation

(24heures/bonasavoir.ch)

Accusée de contrevenir aux principes de solidarité et d’égalité de la LAMal, l’application Helsana+ suscite la polémique. L’OFSP estime qu’elle ne viole pas la loi.


Helsana+ a été homologée par l’OFSP. Reste à voir ce qu’en pensera le préposé fédéral à la protection des données.Image: Keystone

Lancée en septembre 2017, l’application permet aux assurés du groupe «de cumuler des points en récompense de leur mode de vie sain, de leur engagement social et sociétal et de leur fidélité à Helsana», décrit l’assureur. Photographier un repas préparé soi-même, envoyer une copie de son adhésion à un club de sport ou convaincre un proche de signer un contrat chez Helsana rapporte des points. Ces derniers peuvent ensuite être échangés contre une poignée de bons de réduction pour divers articles (cosmétiques, lunettes de soleil, etc.) ou de l’argent.

Avalanche de réactions

Les récompenses en question restent modestes. Il n’empêche, ce programme a provoqué une impressionnante levée de boucliers. Trois interpellations ont été déposées au Conseil national et une vaste coalition regroupant six organisations de patients, de personnes handicapées, de consommateurs ainsi que l’Union syndicale suisse (USS) a écrit une lettre ouverte à Alain Berset. Le texte accuse Helsana de faire «preuve de discrimination à l’encontre des malades et de ceux qui sont incapables de faire du sport, qui n’ont pas les connaissances techniques ou qui attachent de l’importance à leur vie privée».

L’accusation n’est pas anodine. Pour les signataires, l’assureur procède à une chasse déguisée aux bons risques, remettant ainsi en question les principes d’égalité et de solidarité de la LAMal. Le conseiller national Karl Vogler (PDC/OW) estime ainsi que «si d’autres caisses imitent cet exemple, tout le système en sera ébranlé».

Pour Sara Stalder, directrice de la fondation alémanique de défense des consommateurs, Helsana ne procède qu’à une chasse déguisée aux bons risques. «Toutes les personnes n’ont plus le même accès aux assurances. C’est l’esprit même de l’assurance de base qui est ainsi torpillée.»

Avec cette politique, Helsana va à l’encontre du principe de solidarité, accuse le conseiller national Karl Vogler (PDC/OW). «Si les autres caisses maladie s’en inspirent, c’est tout le système qui sera miné.» Tout comme ses collègues Marianne Streiff-Feller (PEV/BE) et Prisca Birrer-Heimo (PS/LU), il a déposé une motion pour la fin de la session de printemps à ce sujet.

De la discrimination cachée?

«L’assurance de base doit être la même pour tous», souligne Marianne Streiff-Feller, également présidente de l’association nationale des institutions pour personnes avec handicap. Elle n’accepte pas que cette application ne récompense que les personnes en bonne santé et discrimine ainsi les autres comme les retraités ou les handicapés. «Les caisses maladie procèdent ainsi à une sélection des risques qui doit être endiguée.» La Confédération a déjà introduit en 2017 des barrières destinées à empêcher la chasse aux bons risques.

Pour Karl Vogler, le programme de rabais d’Helsana va à l’encontre de la politique de la santé voulue par Alain Berset, qui veut améliorer l’égalité des chances. «Ce programme fait exactement le contraire: les malades, les handicapés et les seniors sont clairement discriminés.»

Rien d’illégal selon l’OFSP

Les signataires reprochent aussi à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) d’avoir donné sa bénédiction. Approché par Bon à Savoir, ce dernier assure avoir vérifié que l’application qui lui a été soumise ne viole pas la loi. «Elle n’offre pas de rabais sur les primes d’assurance de base, qui sont interdits, mais simplement des bons de réduction auprès de commerçants, des prestations en nature ou un montant en espèce financé par l’assurance complémentaire. La loi dit aussi que les compagnies doivent traiter leurs assurés d’une manière égale dans l’assurance de base. C’est le cas dès lors que l’application est ouverte à tous les clients d’Helsana et que des points peuvent être récoltés autrement que par des activités sportives. Enfin l’argent utilisé pour ce programme ne provient pas de l’assurance de base, ce qui serait illégal.»

L’application pose également la question de la protection des données. Sur ce point, l’OFSP a alerté le préposé fédéral compétent en la matière. Celui-ci devrait rendre les conclusions de son enquête prochainement. De son côté, le groupe Helsana certifie s’être assuré que son programme respecte à la fois la LAMal et la protection des données.