Strasbourg va trancher sur l’accès pour les handicapés

(lematin.ch)

Alors que la polémique embrase Sion sous les étoiles, la CrEDH doit se prononcer jeudi sur le cas d’un paraplégique Genevois interdit de cinéma pour des raisons de sécurité. Discrimination ou pas ?


L’interdiction d’accès pour une personne handicapée dans un lieu public peut-elle être motivée par une simple raison de sécurité ? C’est un des aspects de l’affaire qui occupera la CrEDH ce jeudi. Image: istock

 

Ce week-end, la situation était tendue à l’entrée du festival Sion sous les étoiles. L’accès au site a été refusé à des personnes à mobilité réduite, qui avaient leur billet, mais n’avaient pas réservé leurs places sur la plate-forme prévue expressément pour elles. Le patron du festival, Michael Drieberg, a justifié cette pratique pour des raisons de sécurité. Hasard du calendrier, la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH) se déterminera ce jeudi 18 juillet sur un cas qui présente des similitudes avec la polémique valaisanne: l’affaire d’un paraplégique genevois à qui on a refusé l’entrée d’un cinéma.

Peur du feu

En 2008, Marc Glaisen, en chaise roulante, voulait voir un film projeté dans un unique cinéma de Genève. Il s’agissait du film «Vinyan» qui ne figurait nulle part ailleurs à l’affiche qu’au Rialto de la chaîne Pathé. Mais il s’était vu refuser l’accès pour des motifs de sécurité. Le risque étant qu’en cas d’incendie, personne ne pouvait assurer son salut. Le client cinéphile était pourtant prêt à en assumer la responsabilité. Malgré les discussions avec l’exploitant, celui-ci ne l’avait pas laissé entrer.

Pas malveillant

L’association faîtière des organisations suisses de personnes handicapées, Inclusion Handicap, avait porté cette affaire de discrimination jusque devant le Tribunal fédéral, où le requérant, qui réclamait 5000 francs de dommages, avait perdu en 2012. Le TF avait estimé que le comportement de l’exploitant «n’était pas discriminatoire parce qu’il avait agi par souci pour la sécurité de Marc Glaisen et que son comportement ne dénotait pas d’intention malveillante», selon Inclusion Handicap.

Le motif de la sécurité

Pour le porte-parole de l’association, Marc Moser, il y a des similitudes entre la polémique engagée à Sion et le cas de Marc Glaisen: «Dans les deux cas, il s’agit de prestations accessibles au public et fournies par des privés comme des restaurants, des stades, des magasins ou des festivals. Par ailleurs, dans les deux cas le fournisseur de prestations évoque des questions de sécurité pour refuser l’entrée».

Restriction de la vie privée

Inclusion Handicap a apporté son soutien à Marc Glaisen durant sa procédure devant la CrEDH, qui a duré finalement sept ans. S’il devait obtenir gain de cause à Strasbourg, cette affaire prendrait une «dimension historique», selon l’association. Mais ce n’est pas gagné, car dans deux affaires similaires – concernant des personnes en fauteuil roulant empêchées d’accéder à une plage et à un bureau de poste – la cour européenne a estimé qu’il n’y avait pas de restriction suffisante pour que l’on parle de discrimination.

Accumulation d’obstacles

Marc Glaisen fait valoir, lui, qu’il ne s’agit pas juger un seul cas particulier, mais de considérer l’accumulation des nombreux obstacles qu’il rencontre, là où une personne en fauteuil roulant n’a pas accès aux prestations fournies au public par des particuliers. «La somme de toutes ces circonstances a bel et bien pour effet de restreindre sa vie privée», estime finalement Inclusion Handicap, qui attend ce jugement avec impatience.