La Suisse peut mieux faire pour les handicapés

La Suisse peut faire mieux en matière de mise en œuvre de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, qu’elle a ratifiée en 2014. Trois associations actives dans le milieu veulent élaborer des mesures concrètes pour l’application du texte.

L’adhésion de la Suisse à la convention est «une étape importante sur la voie vers l’égalité et l’autodétermination des personnes en situation de handicap». Cependant, ces personnes continuent de faire face à «de nombreux obstacles» qui les empêchent de réellement participer aux différents domaines de la vie, soulignent lundi INSOS, Curaviva, et vahs, qui représentent les institutions pour handicapés en Suisse.

Pour permettre une «mise en oeuvre réussie» de la convention, les trois associations veulent élaborer un plan d’action national et une série de mesures concrètes en ce sens. Un groupe de travail a été créé à cet effet. Plusieurs projets partiels sont déjà en cours aux niveaux cantonal et régional.

Parallèlement, le groupe de travail aidera les institutions membres à appliquer la convention à travers des «possibilités d’action et d’exemples de bonne pratique». L’objectif est de permettre aux personnes handicapées de vivre de la manière la plus autodéterminée et autonome possible dans un cadre institutionnel, expliquent les associations.

Les trois associations

INSOS Suisse représente, en tant qu’association nationale de branche, les intérêts de 800 institutions pour des personnes avec handicap.

Curaviva Suisse défend les intérêts de plus de 2600 homes et institutions sociales.

L’Union suisse pour la pédagogie curative et la sociothérapie anthroposophique (vahs) regroupe 43 institutions.

Source :ats/nxp

La Suisse est contrainte d’agir pour l’égalité des handicapés

Les personnes handicapées placées en Suisse sous une curatelle de portée générale n’ont pas le droit de vote et ne sont pas éligibles. Cette situation contrevient à la Convention de l’ONU sur les droits des personnes handicapées à laquelle la Suisse a adhéré en 2014. Les spécialistes travaillent d’arrache-pied pour mettre fin à cette inégalité.


(image Keystone)

Special Olympics Switzerland: Ces filles handicapées peuvent jouer au football comme tout le monde. Mais peuvent-elles aussi voter lorsqu’elles atteignent l’âge de 18 ans?

Il n’y a en Suisse qu’un seul groupe de citoyens qui possèdent le passeport rouge à croix blanche mais qui est privé de ses droits politiques: les personnes placées sous curatelles de portée générale par les autorités cantonales de protection de l’enfant et de l’adulte (APEA) parce qu’elles n’arrivent pas à gérer leur vie de manière autonome. La mesure est unilatérale et aucune possibilité de recours n’existe. Elle entraîne la privation systématique des droits politiques, comme le veut l’article 136 de la Constitution fédérale. Lien vers l’extrait du Code civil suisse (Protection de l’adulte, droit des personnes et droit de la filiation)

Mais l’article 34 de cette charte garantit, lui, les droits politiques de tous les Suisses et de toutes les Suissesses. Ma main gauche ignore ce que fait ma main droite, pourrait-on dire.

«La solution actuelle n’est défendable ni du point de vue constitutionnel ni de celui du droit international», dit Markus Schefer, professeur de droit public à l’Université de Bâle et expert de la question de l’égalité des droits des handicapés en Suisse.

En droit international, le professeur invoque la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées entrée en vigueur il y a neuf ans et déjà adoptée par 174 pays. La Suisse l’a rejointe en 2014, ses dispositions sont donc aussi juridiquement contraignantes dans le pays. Cela vaut également pour l’article 29 qui garantit aux personnes handicapés «la jouissance des droits politiques et la possibilité de les exercer sur la base de l’égalité avec les autres». Et de l’article 5 qui interdit «toutes les discriminations fondées sur le handicap».

La principale critique formulée par Markus Schefer: la procédure de décision de mise sous curatelle de portée générale ne prévoit aucun examen de l’aptitude de la personne touchée à se forger une opinion politique et à l’exprimer. «Nous partons du principe que ces atteintes vont en général de pair, mais ce n’est pas forcément le cas».

Caroline Hess-Klein critique aussi les règles en vigueur en Suisse. La responsable du département Egalité d’Inclusion Handicap, l’association faîtière des organisations suisses de personnes handicapées, estime qu’il faut réduire autant que possible les exigences pour qu’une personne sous curatelle générale puisse exercer ses droits politiques.

Elle estime qu’on pourrait prendre exemple sur le seuil pour le mariage qui a intentionnellement été placé très bas. « Le mariage est un droit si personnel qu’il doit être ouvert à tout le monde. Le Tribunal fédéral estime qu’il suffit d’avoir une notion grossière de ce qu’il représente», dit Caroline Hess-Klein.

Palette d’obstacles
Inclusion Handicap a publié récemment son premier rapport alternatif sur les progrès de la mise en œuvre de la convention de l’ONU sur les droits des handicapés. L’association y relève notamment une «palette d’obstacles» auxquels les handicapés continuent d’être confrontés. Le rapport esquisse aussi des solutions aux niveaux cantonal et fédéral.

Markus Schefer estime en outre que ces discriminations remettent en question l’intégrité du processus démocratique en Suisse. Plus il y a de gens qui en sont exclus, moins il est démocratique. Le professeur établit un parallèle avec la situation avant que les femmes obtiennent le droit de vote. «L’enjeu ici est également notre culture politique, relève-t-il. Aujourd’hui plus personne ne doute de la justesse de la votation sur l’introduction du suffrage féminin en 1971. J’espère que dans quelques années plus personne ne remettra en question le fait que les gens en situation de handicap aient des droits politiques.»

Markus Schefer fait partie des pionniers de la recherche universitaire sur le droit à l’égalité des handicapés en Suisse. Il veut maintenant travailler au niveau international. Le juriste constitutionnel bâlois est candidat un siège dans le Comité des droits des personnes handicapées de l’ONU dont neuf des 18 membres seront renouvelés en juin 2018. Cette instance surveille la mise en œuvre de la Convention dans les États membres et elle émet des recommandations en pointant les obligations auxquelles ils ne satisfont pas encore.

Markus Schefer n’était d’ailleurs pas à Bâle quand swissinfo.ch a pu s’entretenir avec lui au téléphone, mais New York où il mène campagne. Et Caroline Hess-Klein l’accompagnait au siège principal de l’ONU.

«L’ONU attend d’un candidat qu’il ait le soutien des organisations de défense des handicapés», explique la représentante d’Inclusion Handicap. «Avec Markus Schefer, le comité renforcerait son expertise sur les droits de l’homme. Il pourrait ainsi accroître sa crédibilité au sein du système des Nations Unies», estime-t-elle.

Pour réunir un maximum de voix sur la candidature de Markus Schefer, le duo fait fréquemment la navette entre New York et Genève. L’enjeu est de taille. «Un siège dans ce comité donnerait aussi aux personnes en situation de handicap en Suisse une meilleure plateforme pour faire valoir leurs préoccupations au niveau politique», souligne Caroline Hess-Klein.

Et ce qui est tout aussi important: sa présence dans ce comité pourrait contribuer à sensibiliser davantage les autorités suisses aux questions liées à l’égalité des handicapés.

La Suisse compte 1,6 million de personnes en situation de handicap. Les autorités peuvent placer sous une curatelle de portée générale celles qui sont victimes d’une atteinte sérieuse et de longue durée. En l’absence de statistique centralisée, on ignore combien de personnes en Suisse sont touchées par une telle mesure.

La décision est prise de manière unilatérale par les autorités de protection de l’enfant et de l’adulte (APEA). Il n’y a pas de recours possible et elle entraîne la privation systématique des droits politiques, ce qui contrevient à la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées que la Suisse a signée et ratifiée en 2014.

Les cantons de Vaud, Genève et le Tessin offrent aux citoyens handicapés la possibilité de revendiquer leurs droits politiques devant un tribunal. Dans ce cas, le droit de vote n’est valable que pour les scrutins communaux et cantonaux, mais pas au niveau fédéral.

La moitié des États de l’Union européenne se montrent plus ouverts aux droits politiques des handicapés et certains pays ne prévoient d’ailleurs aucune limitation. C’est le cas des Pays-Bas, de l’Irlande et de la Finlande. (Source: Spiegel online).

Source: swissinfo.ch
Traduction de l’allemand: Olivier Hüther

Journée des proches aidants: Le précieux soutien de la CRS

Le 30 octobre la Suisse célèbre la «Journée des proches aidants». A cette occasion, la Croix-Rouge suisse (CRS) tient à rappeler qu’il est important de savoir demander de l’aide à temps et de s’informer auprès des institutions compétentes.

Au vu du vieillissement de la population, la «Journée des proches aidants» a gagné en importance. De plus en plus de proches se sentent dépassés par les soins qu’ils accordent à des personnes de leur entourage et ont besoin urgemment de pauses de respiration. La Croix-Rouge suisse (CRS) propose diverses prestations d’aide qui peuvent faire des miracles dans ce genre de situation.

La CRS recommande à tous les proches aidants: souciez-vous à temps de mettre en place un soutien ciblé et informez-vous sur les nombreuses possibilités (d’aide). Il arrive souvent que les personnes concernées et leurs proches organisent l’aide trop tard et qu’il ne reste alors comme seule solution que l’hôpital ou l’EMS. Les personnes qui s’occupent et soignent des proches à domicile fournissent un travail précieux mais aussi fatiguant. Souvent, les personnes âgées, malades ou handicapées ne peuvent continuer à vivre à la maison que grâce au soutien de leur famille. C’est l’un des buts principaux de la CRS: que des personnes âgées puissent, en Suisse, mener une existence digne le plus longtemps possible à la maison.

L’engagement de la CRS en faveur des proches aidants se focalise sur quatre thèmes: les services d’aide (aussi pour les personnes atteintes de démence), l’information et le conseil, le service de visites et d’accompagnement de même que le conseil à domicile. Plus de 50 projets sont en cours. Chaque année, près de 345 605 heures de soutien sont fournies par les associations cantonales de la Croix-Rouge et leurs bénévoles par le biais des services d’aide et de visites et d’accompagnement. Les prestations de ces domaines varient d’un canton à l’autre. Vous trouvez une vue d’ensemble sur www.proche-aidant.ch (en haut à droite sous «J’ai besoin d’aide») En outre, nos efforts visant la création d’une communauté d’intérêts pour les proches aidants sont en train de porter leurs fruits: dix organisations se sont rencontrées il y a peu afin de concrétiser leurs demandes.

A l’occasion de la Journée des proches aidants, diverses associations cantonales de la Croix-Rouge organisent des actions et des événements, entre autres à Zurich (manifestation sur le thème Work & Care avec le Service d’aide Suisse (Entlastungsdienst Schweiz), voir le site, dans les cantons de Lucerne (annonces, bus), d’Argovie (huit stands en collaboration avec d’autres organisations), de Soleure (quatre stands) et dans le Jura bernois.

La Journée des proches aidants a été lancée par le service d’Aide Suisse (Entlastungsdienst Schweiz), en collaboration avec la CRS. Vous trouvez plus d’informations sur le thème «Proches aidants» sur le site Internet de la CRS
fr: www.proche-aidant.ch
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all: www.pflege-entlastung.ch

it: www.familiari-curanti.ch

Plongée virtuelle dans le combat d’un paraplégique (Echichens)

Le ciné-bus de la Fondation suisse pour paraplégiques proposait samedi (à Echichens) de vivre la vie d’un patient paralysé. Saisissant.


Le casque de réalité virtuelle permet de véritablement s’immerger dans l’expérience d’un patient paraplégique.(Image: Patrick MARTIN)

Une soirée en musique puis le trou noir. Quelques flashs d’un vol en hélico, d’un bloc opératoire, d’un lit d’hôpital. La vue de jambes inertes, quelques mouvements pénibles où notre corps semble d’un coup plus lourd. Et le retour vers le monde extérieur, la vie de famille, un match de basket.

Casque de réalité virtuelle sur la tête, installé dans un fauteuil roulant sur vérins, on entre durant quelques instants dans la vie de Marcel, qui perd l’usage de ses jambes à la suite d’un accident. A la sortie du ciné-bus de la Fondation suisse pour paraplégiques, on reste sans voix; il faut quelques instants pour «digérer» ces images. «Une conférence ou un film classique ne témoignent pas aussi bien de cette réalité, note Simone Leib, responsable ressources humaines de la fondation. Là, on propose un vrai changement de perspective.»

Affrété en mai, le micro-cinéma mobile sillonne le pays depuis, entre événements privés ou publics (comme samedi à Echichens à l’occasion des 50 ans de la fondation Cité Radieuse qui héberge des personnes en situation de handicap physique). Le public visé est double: «On s’adresse aux professionnels qui vont travailler avec des personnes en situation de handicap et à «monsieur et madame tout le monde» pour les sensibiliser», décrit Guillaume Roud, attaché de presse de la fondation.

Ce bref film ne donne qu’un aperçu furtif du combat vers le retour au quotidien. «C’est un combat qui va durer toute une vie, acquiesce Guillaume Roud. En général, lors d’un accident, le patient victime d’une lésion médullaire est acheminé vers notre centre national de Nottwil (LU) pour être pris en charge et opéré. La durée du séjour dépend de la gravité des blessures.»

Une période de rééducation physique, mais aussi «sociale». «A Nottwil, nous disposons d’appartements où les familles peuvent réapprendre à séjourner avec un proche devenu handicapé. Nous accompagnons ensuite les patients et les proches par le biais d’un coaching à domicile ou au centre national. Là-bas, les patients sont dans un cocon où tout est adapté pour eux. Le retour vers l’extérieur doit donc se faire progressivement.»

De fait, le seul maniement d’un fauteuil roulant demande un apprentissage. Pour en avoir le cœur net, nous avons testé le petit parcours aménagé à Echichens par Degonda Rehab, l’un des deux derniers concepteurs de fauteuils roulants du pays.

Le foyer Cité Radieuse est une preuve tangible que cette lente reconstruction ne va pas de soi. «Certains sont en quête de l’apprentissage d’une vie plus autonome, d’autres resteront ici toute leur vie, observe Nicolas Gremod, responsable de la fonction pédagogique et directeur adjoint de Cité Radieuse.

Tout dépend du parcours de chacun. Le but d’une institution telle que la nôtre est de s’adapter et d’adapter les outils pour permettre à nos résidents de retrouver cette autonomie. On est revenu de l’idée «d’intégration» pour parler aujourd’hui plutôt «d’inclusion». Mais dans un pays de normes comme le nôtre, il faut sans cesse répéter ce message. D’où l’intérêt d’une telle journée.»

Source:24 heures.ch

Le premier prix suisse décerné à l’art brut suscite la polémique

Et si l’art brut se normalisait?

La question se pose au moment où, pour la première fois, un prix suisse récompense une production « d’art spontané ». Décerné à Olten (AG), Aare Brut est doté de 5000 francs.

Attribuée par un jury d’experts et par Procap, l’association de défense des droits des handicapés, la distinction est revenue à la Fribourgeoise Rosalina Aleixo.

Cliquez sur l’image pour écouter le reportage de la Matinale (RTS.ch)

Le prix Aare Brut a été délivré en marge d’une exposition qui rassemble les créations de 14 artistes jusqu’à la fin octobre à Olten, dans une exposition éponyme.

Or, la récompense suscite la polémique: un prix est-il légitime pour récompenser les œuvres de créateurs indemnes de toute culture artistique – la définition même de l’art brut?

Curatrice de l’exposition, Emelyne Fichot explique que ce prix a pour but de favoriser l’émergence des créations artistiques de qualité et de permettre une certaine ouverture aux autres, malgré les réticences.

« Si le besoin de reconnaissance est contraire au principe même de l’art brut, les choses évoluent, en même temps que la société », estime-t-elle.

Lucienne Peiry, historienne de l’art et spécialiste de l’art brut, estime que toute initiative est bénéfique pour mettre en valeur les œuvres et les artistes de cet art spontané, mais sans pour autant cautionner l’idée d’un prix.

« L’idée de compétition, de hiérarchie, est à mon avis étrangère, voire complètement contraire, à l’art brut. L’art brut, c’est l’art de l’intimité, de la sauvagerie, les premières pulsations de la création artistique. Un prix ne convient donc pas à cet art qui est étranger, par définition, à l’idée du palmarès », affirme-t-elle.

Reste qu’avec ou sans prix, les œuvres exposées à Olten ont pour objectif de souligner l’importance de l’inclusion dans le domaine artistique, l’art brut étant aussi l’action de création du secret, de la dissidence ou de la désobéissance.

Source rts culture