L’EPFZ refuse un étudiant en situation de handicap

(20min.ch)

L’école polytechnique zurichoise a refusé l’admission à un étudiant à mobilité réduite. Selon le président d’une association d’aide aux handicapés, cette pratique est illégale. Interview.


Jürg Brechbühl est handicapé. Il a subi une lésion cérébrale dans un accident de voiture en 1995. Après des années de rééducation, l’homme de 55 ans a obtenu un diplôme en biologie de l’Université de Berne.

 

La Commission de recours interne des EPF a tranché: l’école polytechnique de Zurich doit verser une indemnité de 10’000 à Jürg Brechbühl (55 ans), à qui elle a refusé l’admission en 2018. L’université a justifié sa décision en expliquant que les études de l’homme en situation de handicap auraient pris trop de temps en raison de ses capacités réduites. Jürg est inscrit au cours de biologie depuis le 27 septembre dernier.

Islam Alijaj, président de l’association d’aide aux handicapés «Tatkraft- Die Personal Botschafter» et candidat au Conseil national (PS/ZH), explique pourquoi le refus de l’EPFZ est contraire à la loi.

Monsieur Alijaj, comment jugez-vous le comportement de l’EPFZ Zurichoise?

L’université enfreint la loi sur l’égalité des chances pour les personnes handicapées, mais ce refus constitue également une violation de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

C’est-à-dire?

Ce n’est pas à la direction de l’école de décider ce que les élèves handicapés peuvent et ne peuvent pas faire. Il est du devoir de l’EPFZ et des autres universités de créer les conditions-cadres pour que tout le monde soit traité de manière égale. Les personnes atteintes de handicaps ne devraient pas être contraintes de se battre pour avoir les mêmes chances que les autres.

Qu’est-ce qui devrait changer?

Les universités telles que les EPF doivent créer cette flexibilité, qui ne leur coûterait en fin de compte rien d’autre qu’une admission. Cela montre clairement la nécessité de renouveler l’image du handicap dans la société: les personnes handicapées ont elles aussi des capacités et elles ont le droit de pouvoir les exploiter. Il n’est pas juste de les en priver.

De quoi avons-nous besoin pour ce changement?

Cette nouvelle compréhension nécessite davantage de points de contact dans la vie quotidienne entre les personnes limitées et les autres. 1,8 million de personnes handicapées vivent en Suisse mais elles sont totalement «invisibilisées».

Connaissez-vous d’autres cas similaires?

Permettez-moi de vous donner un exemple: Après mon apprentissage, j’ai voulu commencer à étudier l’informatique de gestion. J’étais convaincu qu’avec un diplôme universitaire et un soutien approprié, j’aurais eu une chance sur le marché du travail. Mais les représentants de l’enseignement et de l’assurance invalidité m’ont convaincu qu’une rente AI et un emploi protégé étaient plus adaptés.

Pourquoi?

Ce n’est qu’ensuite que j’ai appris que les entreprises recevaient des contributions pour chaque emploi qu’elles offrent à une personne limitée. En outre, le montant de la rente AI dépend du niveau de formation. Je me suis senti trahi. Ni mon employeur, ni l’AI ne se sont intéressés à mes plans de formation. Ces incitations financières malavisées de la part des institutions m’ont privé de mes études.

Que conseillez-vous aux personnes concernées?

C’est pour ça que je me présente au Conseil national. Nous, les personnes handicapées, devons encore nous battre pour des choses fondamentales. Je conseille à toutes les personnes concernées de se battre pour leurs propres droits. Nous devons nous unir.

Y a-t-il quelque chose qui doit changer dans les universités en général?

Une plus grande flexibilité est nécessaire dans l’éducation et dans le monde du travail. Des universités comme l’EPFZ, en particulier, disposent d’un concentré de cerveaux et d’intelligence qu’elles pourraient utiliser pour créer des solutions pour les personnes handicapées physiques afin qu’elles puissent également participer à la vie sur le campus. Il est important de noter que le financement de l’innovation ne va pas forcément résoudre le problème. Il faut également accepter de jouer un rôle pionner dans l’égalité entres les personnes, en proposant et en appliquant des solutions.